Le Phosphore Milharsais

MILHARS DU MOYEN ÂGE à la RENAISSANCE

18 Septembre 2014 , Rédigé par BARRAU Jean-Pierre

Milhars du Moyen Âge (1200-1500)

à la Renaissance (1500-1700)

Le vieux bourg, le village historique, le village fortifié, le vieux village… les appellations ne manquent pas, y compris administratives, « site classé, site inscrit », pour différencier et attirer l’attention sur cet espace communal urbanisé et accroché en colimaçon sur le flanc sud-est du promontoire où culmine à une centaine de mètres le château.

Cette enclave communale particulière a permis d’intégrer et de faire connaître Milhars sur la signalétique environnante ainsi que dans les brochures touristiques spécialisées sur notre territoire, illustrées en grande partie par le fameux « circuit des Bastides » qui relie de nombreux bourgs voisins : Cordes, Pennes, Vaour, Puycelci, Castelnau de Montmirail…

Milhars, aux dires des initiés, n’a pourtant ni la structure, ni l’origine historique d’une Bastide ce qui est assez curieux puisque à l’époque de leurs fondations, les deux premiers Seigneurs de Milhars, Géraud IV de Cazaubon (1281-1295) créera la Bastide de Fleurance dans le Gers et RATIER II de CASTELNAU de VAUX (1282-1291) créera celle de CASTELNAU MONTRATIER Pourquoi sont-ils allés les créer à l’extérieur de leurs terres de Milhars, quant on sait le développement commercial important et le regroupement de population qu’elles généraient ?. Ont-ils souhaité conserver la maîtrise de leur petit fief féodal de Milhars ?

Le terme de « village castra », « bourg castral » (village à proximité d’un château moyenâgeux), ou bien de « Castelnau » (village fondé au moyen âge à proximité d’un château), convient mieux à notre vieux bâti organisé à l’origine autour d’un château féodal, les deux structures étant fortement interdépendantes, le château justifiant l’existence et le regroupement des populations dans sa proximité par la protection qu’il apportait, et les habitants du village fortifié, donnant vie et richesses au château par le travail et les services qu’ils apportaient à leur Seigneur.

Nombre de visiteurs rencontrés à l’occasion, « au parking des Grailhettes », sur les placettes ou dans les ruelles du vieux village n’hésitent pas à confirmer l’originalité de cet ensemble, et c’est souvent par des propos tels que : quelle chance vous avez ! Vous avez un beau village, qu’ils signent leur visite et le souvenir qu’ils gardent de Milhars.

La plus part des communes voisines, inscrites sur ce circuit des Bastides dont nous faisons partie, conscientes depuis longtemps de l’intérêt de leur patrimoine culturel et historique, n’hésitent pas à le promouvoir par des restaurations et des rénovations diverses et importantes, ainsi que par un entretien particulier. Elles organisent même chaque année différentes manifestations médiévales qui s’inscrivent dans une démarche commerciale et économique, complémentaire à la dynamique de leur commune.

Quant est-il pour Milhars ?

On entend souvent s’exprimer une perception négative de notre patrimoine historique, moyenâgeux et Renaissance à partir de l’idée que ce qui nous reste et qui peut être exploitable est sans commune mesure avec ce dont dispose nos voisins. Faut-il se résigner à le laisser s’endormir, à l’abandonner, comme ce fût le cas durant de nombreuses années, sentiment éprouvé par notre poète paysan, Mr Jean-Mercadier, dans son célèbre poème des années 1950 où il écrivait « le vieux Milhars s’endort à l’ombre de ses ruines….. », ou bien se contenter de le retrouver dans la lecture? Il me semble intéressant de faire une évaluation sérieuse de ce qu’a représenté Milhars au moyen âge puis à la Renaissance, pour voir qu’elles parties de notre patrimoine communal s’y rattachent, pour mieux les connaître et cerner ainsi nos atouts liés à ces époques. Nous essayerons par la suite d’engager une réflexion sur une possible démarche et sur de possibles initiatives (avec votre participation), à partir de ce qui existe encore, pour lui donner un plus grand intérêt économique et commercial, dépassant en quelque sorte la démarche de rénovation et de promotion impulsée en 1995 qui arrive peut-être à bout de souffle.

Il me parait contestable en tous cas de voir la Commune de Milhars présentée en tout et pour tout, comme simples « curiosités » sur le seul panneau routier installé sur la départementale 600, au carrefour avec la D 91 embranchement pour Vaour. Cette formulation me parait dévalorisante et inappropriée par rapport à ce que nous sommes réellement et à ce que nous avons à proposer comme témoignage du patrimoine médiéval de notre territoire. Sans faire de surenchères, ni sans prétendre à l’obtention de titres prestigieux, une juste mesure s’impose à mes yeux.

Retour sur l’histoire médiévale de Milhars (1200-1500)

Milhars à cette époque, a existé à partir du nom et à travers les faits d’armes des nombreux Seigneurs-Barons propriétaires du château. Ils se sont succédés à sa tête, en notant que le château de l’époque n’avait rien à voir avec la bâtisse actuelle. En effet, ce que nous voyons de nos jours, c’est un château rénové depuis 1661(renaissance), qui a perdu ce qui faisait toute son originalité féodale, c’est à dire la grande tour carrée de son aile est, qui s’avançait en éperon sur le village. Elle s’est d’abord éboulée en 1878 et elle a été complètement démolie en 1882. Cette tour semblait être la pièce maitresse du bâtiment, pour sa défense, mais aussi pour ses pièces d’habitation. Elle ressortait et était mise en valeur dans un dessin témoin, réalisé en 1600 par L. de Combettes-Labourelie, ainsi que sur le vitrail de la chapelle des seigneurs de notre église, vitrail qui reproduit le château à cette époque. Enfin le cadastre de 1838 témoigne de son existence.

Regardons quelles étaient les caractéristiques des Seigneurs, Barons de MILHARS.

- ils étaient originaires du Quercy (on peut encore retrouver en partie cette origine à travers la forme les toitures de deux bâtiments situés aux abords du château, celle du four banal et celle du bâtiment construit sur la porte du château, qui n’ont rien de commun avec la structure de nos toits albigeois.

- ils étaient catholiques, d’où les conflits permanents sur leurs terres de Milhars en limite de celles tenues par les huguenots, protestants implantés à Saint Antonin.

- ils étaient loyalistes (du côté du roi de France),

- ils étaient hommes d’armes, ne vivant pratiquement pas à Milhars et allaient guerroyer sur l’ensemble du territoire national : des Flandres au Narbonnais et ne revenaient à Milhars que très occasionnellement pour un bref séjour ou pour leurs derniers jours.

- Milhars était pour eux une possession de rapports et de titres, leur véritable action et leur investissement se situant plutôt dans leurs autres fiefs en Quercy, mais pratiquement jamais à Milhars.

Quelles sont les familles des Seigneurs Barons de Milhars ?

Géraud IV de CAZAUBON, 1261-1281 - RATIER II de Castelnau des Vaux, 1282-1292 - Jean RATIER III de Castelnau des Vaux, 1292-1305 - Raymond de CATELNAU des Vaux, 1305-1332 - Arnaud IV de BERAIL, 1332-1398 - Géraud de BERAIL, 1370-1399 - Jean de BERAIL, 1399-1450 - Raymond de CAZILLAC de BERAIL,1450-14583 - Gilles de CAZILLAC, 1483-1509 -

Malgré la grande notoriété du nom de ses Seigneurs, durant cette longue période moyenâgeuse de 300 ans, Milhars n’a connu aucun essor et n’a jamais influencé l’histoire des évènements du territoire. On peut même dire qu’il s’agit d’une époque sombre, sans aucune prospérité, et sans aucune existence particulière, à part peut-être pour les privilégiés proches des Seigneurs- Barons résidants au château. Il ne faisait pas bon vivre et habiter Milhars à cette époque. Essayons de décrire le contexte :

Contexte général de ces 300 années de moyen âge ?

-Aucun développement commercial, ni regroupement de population puisque comme je l’ai déjà indiqué, les responsables Seigneurs-Barons de Milhars, fondateurs et créateurs de Bastides n’ont pas voulu en fonder une à Milhars.

-Aucune sécurité de vie des populations sur la Seigneurie ou la Baronnie : Les responsables, chevaliers Barons, tous hommes d’armes, au service du roi de France, allèrent s’illustrer sur divers champs de bataille, de la Flandre au Narbonnais, mais se sont montrés dans l’incapacité de défendre leur terre de Milhars en particulier durant la guerre de cent ans contre les anglais jusqu’en 1453: Milhars sera plusieurs fois pris, ravagé et pillé par les anglais ; Il ne restera plus que 4 familles en 1376, ou encore contre le banditisme des compagnies de routiers ou de Tuchins, qui écumaient nos terres et tuaient les populations.

Il est vrai que les différents Seigneurs-Barons de Milhars avaient la possibilité durant ces conflits d’aller se réfugier dans des résidences plus sures des différentes baronnies qui leur appartenaient en particulier dans le Quercy proche, et on peut imaginer que leurs origines quercynoises prenaient le pas sur l’intérêt Milharsais.

Si on ajoute à cela,

-L’épidémie de lèpre qui a sévit et s’est développée de 1350 à 1550 dont on retrouve trace dans le nom donné à une source entre la Fontaine et le moulin de la Garenne, en bordure de la rivière Cérou, « la fontaine des lépreux »,

-Les diverses épidémies de peste, de 1343 à 1373 puis de 1510 à 1523, souvent apportées par les belligérants, qui en peu de temps détruisaient le tiers des populations,

-Les calamités climatiques : Grands froids ou grandes sécheresses ou grêle et inondations qui détruisirent les récoltes et provoquèrent de nombreuses famines.

En dépit de cette longue série de malheurs de catastrophes et de destruction

on notera toutefois quelques réalisations importantes durant cette période, qui permettront de structurer le siècle suivant, début de la Renaissance:

-La construction de l’église vers les années 1258, loin du château et du village fortifié. Pourquoi cette situation géographique particulière alors qu’il existait une chapelle au château? L’église porte encore aujourd’hui la marque de cette époque avec :

* une chapelle seigneuriale, caractérisée par sa voûte à « liernes et tiercerons » et des arcs d’ogives de séparation avec le cœur, qui portent, tête de bélier, palmipède ou sirène,

* le grand lustre de cuivre jaune dédié à saint Sébastien, daté des années 1480, ex-voto dit-on offert par le Seigneur de l’époque (le lustre aurait appartenu au château), à la fin d’une longue épidémie de peste (la mort noire), qui avait sévi sur Milhars, particulièrement meurtrière pour la population. On note que sur la partie supérieure de ce lustre, trône une vierge de l’apocalypse biface, dont il n’existe qu’un autre exemplaire sur le territoire national dans une petite chapelle de Bretagne, vierge environnée de rayons flamboyants, les pieds posés sur un croissant lunaire.

-le défrichement de nombreuses terres qui deviendront terres agricoles par la suite, avec un début de développement des cultures de céréales et de plantation de vigne.

-une verrerie qui fonctionnait à Bonnan à partir de 1409.

-Un captage d’eau potable, « la fontaine du rocher », en bordure du Cérou, point d’eau et source d’eau potable, avec la création d’un cheminement stratégique à fleur de colline, côté nord, qui en permettait l’accès à la population du vieux village ( chemin actuellement fermé et interdit en raison de la chute du mur d’enceinte est du château, en face de l’emplacement de l’ancienne tour carrée, qui s’est éboulée dans les années 1878.

-Un four banal, rattaché au château, que les habitants, à partir de 1500 étaient dans l’obligation d’utiliser pour faire cuire leur pain, en fournissant le bois et en payant un droit de cuisson au Seigneur.

-La construction et la mise en service des premiers moulins à eau sur les rivières environnantes, qui comme on le verra par la suite deviendront l’une des principales sources de revenu pour les Marquis de Milhars durant la Renaissance.

EN CONCLUSION

La Seigneurie ou la Baronnie médiévale de Milhars durant 300 ans, de 1200 à 1500, aura été sans grand intérêt et sans aucune influence ni pour la population, ni pour les terres qui s’y rattachaient, ni pour l’évolution de son territoire, compte tenu d’une part des destructions et pillages liées aux différents conflits qui s’y sont déroulés, d’autre part aux ravages de la lèpre et de la peste qui décimèrent à plusieurs reprise la population et enfin au peu d’intérêt manifesté par les seigneurs propriétaires de cette Baronnie qui lui préféraient leur fief Quercynois.

- II Retour sur la période Renaissance de Milhars, de 1500 à 1700, XVI à fin XVII siècle.

Le début de l’époque Renaissance sera très perturbé par la fin de la guerre contre les Anglais et le commencement des conflits liés aux guerres de religion.

Sous l’autorité des Barons, Seigneurs de Milhars, Antoine de Cazillac (1509-1541), et Francois I de Cazillac-Cessac (1541-1593), Milhars dans la continuité de l’époque médiévale précédente, ne connaîtra aucun essor. Il est même occupé par les protestants qui se livrent au pillage et au saccage en 1568 et est considéré comme pillé et ruiné par ces mêmes protestants en 1574.

Pendant ce temps nos seigneurs, au service des armées du Roi, luttent dans différents conflits hors de leurs terres, et se retrouvent en sécurité dans leur résidence quercynoise, le château de LABERAUDIE et y recevant artistes, écrivains et poètes.

La fin de la guerre contre les Anglais, et des guerres de religion, mettra un terme aux désordres perpétuels liés à ces conflits.

Une génération de Seigneurs-Barons, qui deviendront par ailleurs Marquis de Milhars, à compter de 1653 se montrera alors, beaucoup plus intéressée et entreprenante que celle qui l’a précédée durant le moyen âge et la première partie de la Renaissance, faisant du château de Milhars leur résidence principale, et s’engageant résolument pour un développement économique de leurs terres Milharsaises.

Ces changements furent initiés en particulier par Charles de Cazillac-Cessac (1593-1633), puis par Francois II de Cazillac Cessac, son fils ainé de 1633 à 1679.

QUELS SONT CES CHANGEMENTS ?

*Tout d’abord des travaux de rénovations avec modifications importantes de la structure du château féodal et de ses abords, pour que les Marquis de Milhars y disposent d’un lieu de résidence agréable, en la transformant en riche demeure de plaisance seigneuriale.

Les travaux de rénovation furent confiés à Pierre ORADOU un Maître maçon de Toulouse en 1631. L’ancien château féodal désuet, fut transformé, en s’appuyant sur les anciennes fondations et les caves de l’ancienne bâtisse (toujours existantes de nos jours), les murs furent rehaussés et ajourés par les de superbe fenêtres, la façade embellie par des corniches cannelées avec un encorbellement à métopes (panneaux rectangulaires architecturaux), une très belle porte d’entrée fut construite, qui déboucha sur un hall avec dallage en damier reproduisant à profusion le monogramme des Cazillac de Cessac (deux c entrecoupés), on construisit à l’intérieur un grand escalier en pierre s’inspirant d’une réalisation de Versailles, ( informations d’après Jean-Marie Mercadier 1963). Les travaux seront terminés en 1661.

Pour ce qui concerne les abords du château, en 1636, un capucin dit-on habile, capte et amène par une canalisation les eaux de la fontaine de la Mère de Dieu depuis Roussayrolles. Elles se déverseront dans « un lac avec vivier au lieu dit le Parc », sur le plateau, à proximité directe du château. Des barques pouvaient y évoluer. Une grande allée de murier conduisait du château au lac. Cette eau devait également alimenter le château, mais aussi le haut du vieux village car un réseau de canalisation en terre cuite a été découvert venant du château et alimentant la rue haute durant les derniers travaux de rénovation de 2012.

*Un fort développement économique ensuite.

- Au niveau de l’activité agricole,

-D’importantes récoltes de céréales sont réalisées, mais le développement de la vigne et du vin s’accentueront. Le vin de Milhars profitant de l’essor des vins de Gaillac était considéré comme faisant partie de ce terroir et s’expédiait en grande quantité sur BORDEAUX. La grande salle en voute municipale du TINAL située au niveau des caves du château féodal en était le lieu de stockage et de fabrication.

- La construction du Pigeonnier du château vers 1650, colombier en forme de tour ronde, construit sur la rive droite du Cérou, comprenant 365 « boulins » (nids construits dans la pierre pour accueillir un couple de pigeons et leur progéniture), permettra d’améliorer l’assolement des terres et la production des volatiles.

- Les bâtiments de la métairie seigneuriale de la « Forêt », appelée de nos jours « le monastère », sont entièrement refait.

Au niveau du développement d’une activité industrielle,

- l’énergie de l’eau des rivières Cérou, Aveyron et Seye sera utilisée, en créant et en gérant les productions de plusieurs moulins à eau :

Moulin de La Terrisse 1593 sur le Cérou avec 2 meules pour la farine, moulin de Ratayrens 1603 sur L’Aveyron, moulin à blé et farine, mais aussi moulin à foulon, permettant de fouler la laine qui sera aussi doté d’un martinet permettant de frapper le cuivre, moulin d’Arnac sur la Seye, produisant de la pate à papier, moulin de Saulieu 1630 sur l’Aveyron, farine et pate à papier, moulin de Montrozier sur l’Aveyron.

Comme on le voit par la quantité des moulins exploités et par la variété des produits fabriqués, on peut dire que les marquis de Milhars étaient à cette époque de véritables industriel de la meunerie (extraits de propos de Jean-Paul Marion).

- La verrerie de Bonnan continue à produire.

- Un bac qui permet de traverser la rivière fonctionne sur l’Aveyron, sous la gestion du marquis.

*Le développement d’une activité et d’une vie plus intense au château et autour du château de Milhars.

- au château : par l’organisation de nombreuses réceptions, cérémonies religieuses, et fêtes…et par son utilisation en lieu de résidence permanent.

- autour du château par le développement de l’urbanisation et un intérêt pour le bien- être des habitants avec par exemple, la réparation du captage d’eau potable de La Fontaine, pour le maintenir en bon état de fonctionnement.

Suite à un nouveau découpage administratif qui transformait les Baronnies frontalières en Marquisat, à partir de 1653 Milhars devint un marquisat, puisque situé en limite du Quercy, du Rouergue, et de l’Albigeois. Les seigneurs de Milhars portèrent à partir de cette date le titre de Marquis.

CONCLUSION

Un premier siècle Renaissance de transition dans la suite de ce qui se passait au moyen âge, les guerres de religion remplaçant les désordres de celle contre les Anglais, et un désintérêt des Seigneurs de Milhars pour leurs terres.

Puis un marquisat de Milhars prospère durant la fin de la Renaissance durant 100ans, avec le développement de l’agriculture, du commerce, de l’industrie, et la réalisation de nombreux travaux de restauration. Il fait bon y vivre, que ce soit au château (cérémonies, réceptions, canotage…), et hors du château (plus de pillage ni de destruction, on peut construire, travailler et commercer en sécurité), seuls quelques aléas climatiques viendront perturber cette sérénité (gelées tardives de juin 1685, orages de grêle de 1692 qui détruisirent les récoltes, fortes gelées de 1694,1695, ou on verra l’Aveyron gelée durant 1 mois, perturbant fortement l’activité des moulins) et quelques décès liés à la peste qui rôdera encore dans la région de 1625 à 1655.

Que reste-t-il aujourd’hui, 300 ans après, de l’existence de notre Seigneurie- Baronnie moyenâgeuse et de notre Marquisat Renaissance?

Première Hypothèse : on passe par Milhars, par la départementale 600 (3000 véhicules jour), on peut être amené à remarquer deux témoins importants de ce passé moyenâgeux, l’Eglise et le Château.

-Pour l’Eglise : Son clocher attire l’attention, mais la forme extérieure austère et rectangulaire du bâtiment, n’invite pas à la visite. De toute façon elle est fermée et ne peut se visiter qu’aux heures d’ouvertures pour les cérémonies du culte catholique qui s’y tiennent encore régulièrement. En gros elle ne peut être visitée, sauf exceptionnellement sur demande et rendez-vous.

-Pour le Château :

La vision d’une imposante bâtisse qui culmine au point haut de la colline peut attirer

l’attention. A ce jour, le château est PRIVE, ne se visite pas et l’accès jusqu’à sa grille d’entrée semble même contesté de nos jours. Il n’est qu’une image, une masse compacte que l’on peut éventuellement capter de l’extérieur, correspondant au château de 1661, amputé de sa tour carrée démolie en 1882. Il n’a plus qu’un intérêt visuel et historique, de jour, car n’étant pas éclairé, il disparaît à la nuit. Depuis le 4 mars 2014, date de l’éboulement d’une partie du mur d’enceinte est, il ne donne plus l’image d’un bâti qui « défie les saisons », comme l’écrivait Mr Jean MERCADIER, mais au contraire la perception de subir l’œuvre du temps et de se délabrer et d’être abandonné.

Je rappelle qu’ il a été propriété de la Commune à compter de 1799, que plusieurs générations de Milharsais l’ont fréquenté et l’ont arpenté en long et en large, puisque à compter de 1880, c’était là, le siège des services de la Mairie, le lieu de fonctionnement de l’école publique, et des religieuses .

Les plus curieux qui parviennent à accéder en proximité, peuvent encore découvrir :

-son accès, la porte haute ou porte de la Peyrade, porte fortifiée avec mâchicoulis, dernièrement restaurée et habitée, certainement de l’époque moyenâgeuse

-l’extérieur de sa chapelle dédiée à Saint BLAIZE, aux ouvertures en piteux état, mais surplombée par une terrasse dont on devine l’imposante rambarde, restauration Renaissance). La structure de la chapelle date du château féodal.

-une tourelle d’angle

-l’impressionnante hauteur de son mur d’enceinte, malheureusement invisible dans sa partie la plus caractéristique, celle qui comportait des arcs de décharge, depuis l’éboulement du 4 mars 2014, de construction récente, certainement après la démolition de la tour moyen âgeuse, puisqu’on ne retrouve pas son emprise sur le cadastre de 1938.

Autrement dit bien peu de chose, quelques aspects anecdotiques par rapport à la richesse architecturale existante, démontrée, et enregistrée par son classement du 12 mai 1943 sur la liste des sites et monuments naturels.

D’un point de vue du développement touristique, ces deux importantes structures, témoins centraux du moyen âge à Milhars, ne se visitant pas, n’ayant pas de signalétique fonctionnelle, n’étant plus éclairées la nuit, s’avèrent de peu d’utilité.

Deuxième hypothèse : on décide de s’arrêter par hasard à Milhars et là, disposant d’un peu plus de temps voyons comment s’organisent les visiteurs ?

Comme les deux parkings principaux, place des marronniers et aire Cazarin-Poujade, tournent le dos au vieux village et qu’aucune signalétique incitative ne l’indique, on ne s’y engage pas, ni pour la visite ni pour la découverte. On se contente (certains diront que ce n’est déjà pas si mal), de l’ombre des marronniers, de la fraicheur de la rivière et de l’image lointaine du château en haut de la colline.

Troisième hypothèse : on a entendu parler du vieux village, ou on la vu évoqué sur des brochures touristiques, ou bien on réside à Milhars, seul ou avec des amis on décide alors de s’y rendre et de le voir de près, ou encore on séjourne en gite à Milhars et on dispose de quelques brochures incitatives, alors on va s’y promener

Que retrouve t’on des époques moyenâgeuse et Renaissance , dans le vieux village?

- Globalement : Depuis la route de Vaour, la D9, où depuis Cargomieche, colline opposée, où encore en s’engageant sur la route du Bonnan bien qu’on soit gêné par le rempart, ou encore depuis le parking des Grailhettes, il donne l’impression d’un ensemble bâti encore compact, à l’architecture en pierre, homogène, accroché en colimaçon sous le château. Seules deux façades de maison recrépies et quelques rénovations récentes du château (cheminée crépi en chaux ou ciment blanc, et cadres de fenêtres en acier blanc) viennent en perturber l’harmonie).

La qualité architecturale de ce vieux village est reconnue administrativement puisque une partie est classée au titre des sites inscrits par arrêté ministériel du 6 mai 1943.

- En cheminant à travers ses ruelles et placettes, l’ensemble des cheminements étant du domaine public peut donc être utilisé sans aucune contrainte, on remarque une organisation du bâti typiquement moyenâgeuse, en 4 niveaux de profondeur :

-premier niveau, encerclant l’ensemble du bâti, un grand mur en pierre, quelquefois de 8

mètres de hauteur, première ligne de défense, le rempart.

-deuxième niveau, derrière le rempart et devant les portes d’entrées fortifiées, les 3

places où s’exerçaient le commerce et les différentes transactions, situées devant les 3 portes d’entrées fortifiées : Place du Ravelin devant la porte haute qui comporte encore quelques créneaux de défense, place du Foirail devant la porte du milieu, (détruite de nos jours par les éboulements de 1920 et la place de l’ormeaux devant la porte basse.

-un troisième niveau constitué par l’alignement des 3 portes fortifiées avec les façades mitoyennes des maisons.

-un quatrième niveau, derrière cette ligne défensive, constitué des différents quartiers avec au point haut, une place de regroupement des habitants, « la place du sol de l’hoste ». Quartier de la chapelle St Blaize, avec actuellement 4 maisons disparues, quartier du foirail avec 5 maisons éboulées et disparues, quartier de la porte basse avec 5 maisons écroulées et malheureusement disparues de nos jours.

L’ensemble du bâti encore existant a été en grande partie restauré.

Durant ces dernières années la municipalité, avec l’aide de l’école des mines d’ALBI-CARMAUX, a consolidé 4 maisons, a rénové les ruines existantes, les deux vielles portes fortifiées d’entrée, restauré les remparts, créé et sécurisé les cheminements qui permettent de découvrir l’ensemble du site. Tout dernièrement encore l’ensemble des réseaux ont été enfouis et l’éclairage public a été rénové, permettant d’en valoriser le paysage, en éliminant pilonnes et fils aériens de la vue. Enfin la grande salle en voûte, dite le TINAL du château devenue propriété publique à été restaurée pour l’ouvrir au public sous la gérance de MIARS.

De nombreux propriétaires privés se sont joints à l’effort municipal pour restaurer le bâti anciens, moyenâgeux, Renaissance et post Renaissance qui leur appartenait et qui se trouvait en très mauvais état. On peut, au gré de la visite le découvrir depuis l’extérieur des bâtiments. Notons en particulier, la maison du régisseur (fenêtres à « meneaux »), peut –être ancienne maison moyenâgeuse des « Gardes », , la ferme du château (anciennes écuries), la maison fortifiée sur la porte d’entrée du château, en forme de « barbacane », la maison dite du notaire, la maison du maçon (maison habitée par Maître Oradou durant la restauration du château), la maison pigeonnier de la porte haute, ou encore la grande façade de la maison de la place de l’ormeau. Seules deux maisons restent encore à restaurer, l’une située derrière la porte basse qui est en train de l’être et l’autre au dessus, dite « l’auberge », qui devrait reprendre vie.

On peut encore accéder et découvrir le four banal, qui est propriété privée, donc ne se visite pas, avec en dessous la prison du château. L’ensemble est à rénover.

Que retrouve t’on des époques moyenâgeuse et Renaissance à l’ extérieur du bourg ?

Installations sur ou en proximité de la rivière:

-les moulins sont tous des propriétés privées et aucun n’a gardé ses productions ni ses activité moyenâgeuse.

-les deux fontaines, du rocher et des lépreux sont propriétés publiques, librement accessibles, le lavoir fontaine du rocher a récemment été restauré par la municipalité, mais la potabilité de l’eau n’étant pas vérifiée, il est dangereux d’en boire.

-le bac sur l’Aveyron a disparu et a été remplacé par le pont.

Installations de Bonnan,

-la métairie de la Forêt existe toujours, elle est propriété privée, dangereuse car en mauvais état, mais on peut la voir en bordure du chemin de randonnée du Bonnan.

-la verrerie a disparu, seuls quelques initiés connaissent l’emplacement du four qui est propriété privée.

-la canalisation en terre cuite conduisant l’eau depuis « la fontaine de la mère de dieu » et le lac du parc n’existe plus. On retrouve toutefois sur le versant Nord de la vallée du Bonnan, son tracé et quelques morceaux de canalisation.

Exploitation des terres agricoles.

Les terres des Seigneurs-Barons-Marquis de Milhars sont devenues des propriétés privées, et la production de richesse qu’elles généraient à l’époque grâce aux vignes et au vin, a complètement disparu aujourd’hui. Seul témoin de cette époque, la salle communale du TINAL, ouverte au public et gérée par l’association MIARS et quelques petites parcelles de vigne appartenant à un seul propriétaire privé.

Conclusion

Quelques pistes :

- I Affirmer à tous les niveaux que la promotion du village historique, village en grande partie médiéval, est un axe prioritaire de développement de la commune et qu’il existe une volonté réelle de le prendre en compte.

- II Dans cette hypothèse, apporter des réponses à plusieurs questionnements centraux.

*Constater et c’est l’expérience qui l’a démontrée, que l’efficacité ne pouvait venir que de la coordination et d’une volonté mise en commun de plusieurs acteurs du développement local. Comment maintenir cette communauté de volonté et d’action?...

*Constater que la taille de notre village ne peut se comparer aux grands sites voisins, Bastides ou châteaux fortifiés ouverts au public. Comment mieux affirmer et valoriser notre spécificité et particularité de village Castra ?....et comment lui donner plus d’identité historique pour en faire une attractivité territoriale reconnue?...

*Constater qu’une visite promenade dans le vieux village, même si on peut tomber sous le charme des vieilles pierres, est courte et peu satisfaisante sans les explications et les informations sur leur histoire. Comment apporter ce supplément d’intérêt ?....

*Constater qu’une offre touristique (boutique d’artisanat du terroir, par exemple) en renforcerait l’attractivité. Constater que cette offre touristique, boutique du terroir, Tinal, comme les commerces en milieu rural doivent être toujours ouverts pour accueillir des clients potentiels, et non l’inverse, recevoir les clients aux heures d’ouverture. Comment répondre aux contraintes de cette offre supplémentaire?....

*Constater le peu d’intérêt actuel des 3 vacants communaux. Comment les intégrer dans le moyen terme a du développement de ce secteur ?...

*Constater que la signalétique touristique, sur l’axe routier principal, et sur les parkings les plus utilisés est inexistante ou peu attractive. Chercher à répondre à cette exigence ?.....

-Constater que l’attractivité architecturale du vieux bourg, nécessite de veiller et de renforcer régulièrement l’entretien, les rénovations et les mises en valeur de l’ensemble des cheminements et des espaces communaux. Trouver des solutions pour y répondre?....

*Constater l’intérêt et la demande des promeneurs pour une visite guidée du château. Comment résoudre ce problème ?...

*Constater l’existence d’autres atouts historiques moyenâgeux et Renaissance sur la commune que le seul vieux village et le château, d’où la nécessité d’une offre touristique élargie à l’église, aux moulins, aux pigeonniers, aux fontaines, à la canalisation de la mère de dieu, à la verrerie du Bonnan, à la métairie de la Forêt …… Comment les intégrer ?...

*Constater que la publicité et la communication sont les deux piliers des actions de promotion qui sont entreprises. Comment se montrer efficace et professionnels dans ces deux domaines ?...

*Constater les nuisances de toute activité nouvelle, comment peut-on promouvoir un développement touristique sans gêner les résidents, conditions essentielle du vivre ensemble. Où situer les limites et les garde-fous ?....

-III Enfin, après être tombé d’accord sur l’ensemble de ces interrogations

et certainement même sur quelques autres, car la liste n’est pas exhaustive, comment définir un nouveau projet de développement, sa mise en oeuvre, sa programmation, en trouvant les maîtres d’œuvre, les financements et les responsables du fonctionnement. Il y a du pain sur la planche !

Interrogation finale :

La commune dispose bien d’un patrimoine historique moyenâgeux et Renaissance divers et exploitable. L’évaluation ci-dessus vient de le prouver. Ce patrimoine doit être un atout de développement local, dans le contexte de la dynamique touristique de notre territoire.

Est-ce que les efforts effectués par une génération durant ces 20 dernières années, pour sortir ce patrimoine de l’abandon, de la désolation , voir de la disparition, pour lui redonner de la vie et de l’intérêt, que ce soit par du bénévolat, des actions municipales ou l’activité de l’association locale de «sauvegarde et de promotion des sites », resteront sans suite, faisant retomber le Milhars médiéval dans l’abandon et l’oubli, ou au contraire permettront-ils de rebondir vers de nouveaux projets plus dynamisant, l’avenir nous le dira ?

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B
Merci de votre intervention qui me permet de corriger mon propos. Comme vous vous en doutez, je ne voulais pas faire oeuvre d'historien, mais l'erreur de date que vous signalez est inconcevable;Le titre de l'article sera donc modifié comme suit : Milhars du Moyen âge à la Renaissance et le découpage et le contenu le seront aussi pour tenir compte de cette réalité.<br /> Barrau Jean-Pierre
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D
Généralement, pour les historiens, le Moyen-Âge se termine en 1492 :<br /> - fin de la Reconquista espagnole, fin du royaume arabe de Grenade,<br /> - découverte de l'Amérique par Christophe Colomb.<br /> Certains font référence à &quot;l'invention&quot; de l'imprimerie plus difficile à dater puisque c'est un processus évolutif mais que l'on situe vers 1450.<br /> Donc le Moyen-Âge se termine dans la seconde moitié du XVème siècle, temps des Grandes Découvertes.: imprimerie, boussole, gouvernail d'étambot ...<br /> Claude DAGADA
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